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C'est le dernier en date des faits de violence scolaire. Il serait lié à une sombre histoire de scooter. Un élève de 16 ans soupçonné d'avoir grièvement blessé un jeune homme de 18 ans, en lui portant un coup de couteau près du coeur, dans l'enceinte du lycée Pierre-de-Coubertin de Calais (Nord), a été mis en examen vendredi 28 mars pour "tentative d'assassinat" et écroué. Les jours de la victime, hospitalisée dans un état grave, ne sont plus en danger. Le pire a été évité de justesse. La publicité donnée à des événements dramatiques, quelques-uns chaque année, tend à nourrir l'idée d'une insécurité généralisée. Il n'en est rien, même si le phénomène des violences scolaires, tel qu'il a pu être statistiquement mesuré ces dernières années par l'éducation nationale, est bel et bien en augmentation.

Entre 2002-2003 et 2005-2006, les violences touchant les conseillers principaux d'éducation, les personnels de surveillance et les enseignants ont augmenté en moyenne de 25 % dans les écoles, collèges et lycées. Mais il ne s'agit pas d'une augmentation uniforme : elle est concentrée sur les 6% à 10% d'établissements les plus difficiles. Ces chiffres, les plus récents fournis par l'éducation nationale, sont issus du logiciel Signa, système informatisé de recueil de données qui permettait à chaque établissement d'établir un relevé des faits de violence. Analysées en 2007 par l'Observatoire national de la délinquance (OND), les dernières données Signa montraient une augmentation moyenne, en 2005-2006, de 7 % des incidents de toute nature touchant les enseignants.

ENQUÊTES DE "VICTIMATION"

"La violence scolaire, quand elle est présente, relève plus d'une pression au quotidien, répétitive, faite de micro-violences que des événements spectaculaires ou dramatiques qui attirent parfois l'attention, et les écoles restent largement des lieux sûrs", tempère Eric Debarbieux, professeur en sciences de l'éducation à Bordeaux-II et directeur de l'Observatoire international de la violence à l'école. Prendre la mesure exacte du phénomène reste toutefois difficile. Ainsi, le logiciel Signa a dû être abandonné après la publication en 2007 par l'hebdomadaire Le Point d'un "palmarès" des établissements dangereux. S'estimant piégés, les chefs d'établissements n'ont pas voulu continuer. Ce "thermomètre" ayant été cassé, l'éducation nationale a mis au point un nouvel outil : le système Sivis (système d'information et de vigilance sur la sécurité scolaire), dont le principe consiste à relever seulement les faits les plus graves, et seulement sur un panel d'établissements. Ses premiers résultats devraient être connus dans quelques mois.

Même amélioré, ce type de recensement ne peut cependant que sous-estimer le phénomène : la plupart des faits n'ont pas lieu devant les adultes et la loi du plus fort va toujours de pair avec la loi du silence. Une méthode de mesure plus fiable est ce qu'on appelle les enquêtes de "victimation". Elles se pratiquent sur des échantillons représentatifs et consistent à faire relever, par des équipes indépendantes de l'administration, "qui se déclare victime et de quoi". Certaines de ces enquêtes, déjà menées en France depuis 1995, révèlent par exemple un écart énorme - jusqu'à 200 fois - entre le taux de racket déclaré par les élèves et celui enregistré par l'administration. Sur recommandation de l'OND, ces enquêtes devraient se généraliser dans les années qui viennent.

Dès ses débuts, ce travail a mis en lumière la réalité de "l'effet établissement" sur la violence : à conditions sociales équivalentes, certains s'en sortent beaucoup mieux que d'autres. Il a également mis l'accent sur la nécessité de stabiliser les équipes pédagogiques dans les zones les plus difficiles. C'est pourquoi les meilleures stratégies de prévention se mènent au niveau de l'établissement lui-même et incluent le partenariat avec la police, les services sociaux, la justice, et surtout les familles. Mais ce partenariat, explique Eric Debarbieux, "ne peut être, à lui seul, une solution. Les établissements les plus touchés sont ceux où les équipes éducatives sont les plus instables, donc la solitude des enseignants la plus grande. L'actuel mode de nomination des enseignants du second degré, qui propulse les jeunes aux postes les plus durs, est un des facteurs de cette instabilité. Par ailleurs, ils doivent être formés à connaître les phénomènes de violence, gérer leur stress, animer un groupe..." Eric Debarbieux insiste sur le fait que "c'est sans doute la réforme majeure à introduire : une formation initiale et permanente incluant à égale dignité les savoirs disciplinaires et la pédagogie. "
Luc Cedelle

http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/04/01/violences-scolaires-la-loi-du-plus-fort-et-la-loi-du-silence_1029524_3224.html#ens_id=1027409

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